Dans une nouvelle étude, Transport&Environment accuse les voitures hybrides rechargeables d’être trop polluantes par rapport aux valeurs officielles, mais se trompe de problématique.

Très militante dans la transition énergétique des transports, Transport&Environment publie une nouvelle étude sur les hybrides rechargeables. Le portrait de l’ONG européenne est très sombre, voire très agressif, vis-à-vis de la technologie.

« Les voitures hybrides rechargeables sont de fausses voitures électriques, construites pour les tests en laboratoire et les réductions de taxes, pas pour la conduite réelle », lance Julia Poliscanova. « Nos essais montrent qu’en conditions optimales, avec batterie pleine, les véhicules polluent plus qu’annoncé. À moins de conduire doucement, les émissions de CO2 peuvent décoller », poursuit-elle.

Pour étayer ses propos, l’ONG s’appuie sur une étude d’Emission Analytics et met trois modèles en avant : le BMW X5, le Mitsubishi Outlander et le Volvo XC60. Le premier est le plus pénalisé avec près de 250 g/km de CO2 et jusqu’à 380 g/km en mode recharge via le moteur essence. C’est moins radical pour le XC60, avec moins de 200 g/km en hybride et 235 g/km en recharge. Côté nippon, l’Outlander PHEV grimpe à plus de 160 g/km en hybride, et obtient 210 g/km en recharge alors qu’il affiche 40 g/km selon le cycle WLTP.

Le rapport de T&E indique également une autre valeur « mode électrique » qui associe roulage électrique et hybride sur une distance de 90 kilomètres environ. Avantagé par sa grosse batterie, le BMW X5 est celui qui affiche le bilan vertueux avec des émissions de CO2 à 42,3 g/km. Arrivent ensuite le Mitsubishi Outlander PHEV et le Volvo XC60 avec respectivement 85,8 et 115,3 g/km. Ce que T&E oublie (sans doute volontairement) de préciser, ce sont les consommations constatées qui restent malgré tout bien en deçà de ce que pourrait réaliser un modèle 100 % thermique sur le même trajet. Le BMW X5 affiche ainsi une moyenne de 1,89 l/100 km et l’Outlander PHEV 3,8 l/100 km. Plus gourmand, le XC60 clôt l’exercice avec 5,11 l/100 km de consommation moyenne.

Le tableau qui récapitule les résultats des tests réalisés par Emission Analytics que T&E n’a pas jugé utile de relayer

Une communication incomplète et biaisée

L’ONG enfonce des portes ouvertes, en écrivant qu’avec une batterie vide, les émissions de CO2 sont « 3 à 8 fois supérieures » au cycle moyen WLTP. Normal, si l’on désactive l’élément important de ce type de véhicule, il est facile de gonfler ses défauts.

Tout est question d’usage comme le rappelle T&E en citant justement l’étude de l’ICCT, qui a inspiré le très mauvais reportage de TF1, où les conducteurs qui utilisent mal leur voiture polluent « deux à quatre fois plus » que prévu. C’est tout aussi vrai pour des modèles thermiques classiques. Un X5 diesel 400 ch (équivalent à l’hybride 394 ch) émet officiellement jusqu’à 242 g/km sur le papier, et probablement beaucoup plus dans la réalité.

T&E parle également de la conduite en mode recharge, c’est-à-dire lorsque le moteur essence alimente la batterie en énergie. Évidemment, la consommation y est très importante, « 3 à 12 fois plus » que les valeurs officielles, puisque le moteur thermique vient à la fois recharger la batterie et animer les roues. Encore une fois, T&E cible les pires des comportements.

Côté technique, T&E considère les hybrides rechargeables « mal conçues » en raison de la faiblesse de leurs moteurs électriques et de leurs capacités de charge limitées. Si l’information se vérifie pour certains modèles, elle se révèle totalement erronée pour d’autres. C’est le cas avec le modeste Renault Captur e-tech et ses 160 ch, ou le Land Rover Evoque P300e dont la capacité de charge grimpe jusqu’à 32 kW.

CO2 et consommation, les valeurs Automobile-Propre

Chez Automobile Propre, nous avons toujours été transparents avec la voiture hybride rechargeable. Lors de nos différents essais, nous avons toujours publié les valeurs réelles constatées lors de nos trajets. Pour ce qui est des modèles cités, voici pour rappels nos relevés :

Nous n’avons pas d’essai en stock pour le XC60, mais voici les résultats du XC40 T5 : 38 km en électrique et 7 à 8,5 l/100 km batterie déchargée (vs 1,9 l/100 km WLTP)

L’hybride rechargeable efficiente : un exemple concret

Je vous soumets ainsi mon expérience dans une Mini Countryman Cooper SE. Au mois de mars 2020, j’ai couvert un aller-retour entre Paris et les Landes. En effet, la consommation monte au-dessus de 10 litres aux 100 kilomètres sur autoroute. Logique, le SUV est lourd et peu aérodynamique. Mais une fois dans le Sud-Ouest avec un usage plus local et la possibilité de recharger régulièrement, les trajets courts ont été réalisés presque exclusivement en 100 % électrique. En une semaine, j’ai utilisé très peu de carburant et la consommation était donc bien inférieure aux valeurs WLTP.

Mini Countryman Cooper SE recharge

En branchant régulièrement, le problème du CO2 s’évapore…

Vendre l’hybride rechargeable au bon client

Encore une fois, le choix d’une voiture hybride rechargeable est avant tout une question d’usage.

Une voiture hybride rechargeable doit être vendue à une personne ou entreprise ayant une possibilité de charger régulièrement pour rouler électrique au quotidien et dont les usages « longs trajets » restent ponctuels.

Dans ces conditions, ce type de transport est moins polluant qu’un véhicule classique. Ainsi, il faut rester rationnel, et ne pas tomber ni dans la dénonciation d’une pollution fantasque ni dans une vertitude idéale. Toutefois, nous comprenons qu’un bonus soit abusif pour ce type de véhicule en France, où l’absence de malus devrait suffire.

Plutôt que de taper bêtement sur la technologie en ciblant ses pires usages, T&E devrait dénoncer les mauvaises pratiques commerciales et la piètre communication ou pédagogie les accompagnant.

Range Rover Evoque hybride rechargeable P300e 2020 charge

L’Evoque P300e charge jusqu’à 32 kW