La saison 2019 de la Coupe E-Rallye de Régularité de la FIA a débuté ce week-end en Grèce. A bord d’une Volkswagen e-Golf mise à disposition par l’importateur local, j’ai remporté les deux catégories proposées : régularité et consommation. Récit…

Les engagés : des Zhidou D2S aux Audi e-tron

Réservée aux véhicules électriques, la Coupe E-Rallye a proposé quelques surprises pour cette première manche de la saison organisée dans la région d’Athènes. Treize équipages étaient au départ, dont quatre étrangers. Au-delà des très traditionnelles Volkswagen e-Golf (3), BMW i3 (3) et Nissan Leaf (1), quelques très récents modèles étaient inscrits : Audi e-tron (2), Jaguar I-PACE (1) et Tesla Model 3 (1). Les deux derniers équipages présentaient une exotique microcar d’origine chinoise : Zhidou D2S (2).

Stricte 2 places de 2,81 mètres de longueur, la Zhidou possède un moteur de 15 kW (puissance en pic à 30 kW) avec une batterie de 18 kW. De quoi ne consommer que 7 kWh / 100 km dans des conditions optimales (selon le constructeur !).

Source :zhidou.gr

L’itinéraire : d’Athènes à Marathon

Le départ était donné face à la Mairie d’Athènes. Enclavée entre la mer et les montagnes, la capitale de la Grèce peine à effacer la forte pollution ambiante. Sortis de la ville, nous avons affronté les collines environnantes avec des passages à plus de 750 mètres d’altitude.

Deux étapes par jour étaient au programme avec une charge d’environ 4 heures entre chaque boucle. Le samedi après-midi, la route emmenait les concurrents vers Magoula et Stefani pour 82 km. De nuit, la deuxième étape allait vers Labrika pour 65 kilomètres. Le dimanche, passage à Marathonas et Dionissos sur 97 kilomètres, puis final à Varibobi sur 85 km.

Au total, l’itinéraire mesurait 330 kilomètres, dont 99 en zones régularité. En dehors des Zhidou D2S, aucune voiture n’avait vraiment besoin de charger en journée…

La course

L’épreuve est composée de deux classements bien distincts : la consommation, mesurée au terme de la première journée, et la régularité, avec neuf tests et une centaine de kilomètres à parcourir en « défiant » un chrono.

Pour moi, il a d’abord été nécessaire de prendre en main la Volkswagen e-Golf que je ne connaissais absolument pas. Et pour commencer le rallye : première erreur. Il m’a fallu une vingtaine de kilomètres pour me rendre compte qu’au démarrage du moteur, le mode Normal est sélectionné par défaut. Alors que nous étions là pour « jouer » la consommation, des kWh étaient déjà consommés en pure perte. Il a également fallu se caler sur le rythme à adopter au cœur de la circulation locale. Nous sommes sortis doucement du centre-ville en évitant autant que possible d’être dans le flux des conducteurs qui n’ont pas les mêmes notions de la sécurité routière que nous. Un Stop doit être très officiellement considéré comme un léger « cédez le passage » et le passage au rouge d’un feu tricolore laisse un crédit de « quelques » secondes à ceux qui arrivent lancés. Et le « quelques » peut signifier une vraie poignée ! Ce qui peut paraître anodin ne l’est absolument pas. Si vous vous arrêtez à un stop, le conducteur placé derrière vous sera très surpris et il vous le fera comprendre.

En évitant de se mêler à cette guerre ouverte de klaxons et de dispense de clignotants à des vitesses inavouables en ville, nous avons perdu beaucoup de temps. Le pointage approchant, il a fallu très largement accélérer le rythme pour être à l’heure au départ de la première zone de régularité.

Cette première « ZR », quasiment totalement en montée, était un calvaire pour la consommation. En essayant de rester au plus proche de la vitesse moyenne imposée (45,8 km/h sur les 3,58 premiers kilomètres, puis 38,7 km/h jusqu’à l’arrivée après 14,52 km), il devenait compliqué de conserver les codes de l’écoconduite. La ZR 2 débutait quelques centaines de mètres plus loin, avant d’entamer la redescente vers Athènes.

Sans connaître les résultats des deux premiers tests de régularité, qui ne sont donnés que lors du retour au parc fermé, il fallait enfin se concentrer sur la consommation. En descente, l’objectif était d’adapter la vitesse moyenne à l’heure de pointage et de maximiser la régénération d’énergie en utilisant le mode Brake sur le levier de vitesses.

Si les résultats de la régularité se sont révélés plutôt bons avec 1 points dans la ZR1 (décalage d’un dixième de seconde par rapport au temps idéal – 1er au classement) et 20 points dans la ZR2 (deux secondes d’écart) pour s’installer à la troisième place du général, ceux de la consommation étaient assez mauvais par rapport à la concurrence…

Enregistrées selon ce qui était récupéré sur les bornes de recharge (Socket F – 16A), les données plaçaient les Zhidou D2S largement en tête avec 7,1 et 7,7 kWh consommés. Suivaient des BMW i3 et les autres Volkswagen e-Golf entre 8,9 et 9,4 kWh consommés. Je n’étais alors que sixième avec 9,6 kWh…

Après la pause de charge, le parcours nous emmenait vers le sud et les routes côtières pour deux courtes ZR de nuit. Dans la ZR3, tous les favoris oscillaient autour des 40 points de pénalité et j’ai réalisé le score parfait dans la ZR4 avec 0 point de pénalité pour me placer à la deuxième place du classement régularité au terme de la deuxième étape.

La nuit marquait surtout la fin de la prise en compte de la consommation pour cette première manche de la saison. En évitant (enfin) de partir sur le mode Normal et en sentant un peu mieux les réactions de l’e-Golf, tant à l’accélération qu’à la décélération, j’ai pu inverser la tendance pour établir le meilleur score de la deuxième étape en consommant 7,2 kWh en 66 kilomètres, dont une dizaine étaient chronométrés.

La performance a été suffisante pour passer devant les autres concurrents. Notre e-Golf a eu besoin de 16,8 kWh pour effectuer 146,77 km, soit une moyenne de 11,44 kWh / 100 km. Le deuxième, aussi sur une e-Golf termine à 12,87 kWh / 100 km, soit un écart de 12,5 %. La meilleure des i3 termine au troisième rang avec 13,25 kWh / 100 km, la première Zhidou D2S est quatrième avec 13,89 kWh / 100 km. La Leaf pointe plus loin à 14,37 kWh / 100 km, la première e-tron est à 19,75 kWh / 100 km et l’I-PACE clôture le classement à 23,91 kWh / 100 km.

Dimanche, la journée commençait par une boucle de trois zones de régularité, dont une zone à Marathon, à boucler à 42,2 km/h de moyenne. Avec deux points de pénalité dans la ZR5 (deux dixièmes de décalage) et cinq points dans la ZR6 (cinq dixièmes), je passais en tête du classement de la régularité avant de conforter cette position dans la ZR7 avec 40 points (4 secondes).

De retour à Athènes pour un passage en parc fermé, nous avons appris que le rallye était terminé à cause d’une manifestation devant la mairie. La dernière boucle avait été annulée.

Ce sont donc deux victoires qui lancent cette saison 2019. En Consommation, nous devançons le vainqueur de l’an passé Thomas Papapashos et son copilote Giannis Harpidis de 12,5 %. Seuls des équipages grecs entrent dans les points.

En Régularité, nous terminons avec 7 points d’avance sur la Jaguar I-PACE de Dimitris Stavropoulos et George Delaportas, habitués de grandes épreuves comme le Rallye Monte-Carlo Historique. Les tenants du titre Didier Malga et Anne-Valérie Bonnel terminent troisièmes avec leur Tesla Model 3 à 24 points. Le reste des points sont distribués à des équipages locaux en Nissan Leaf, Zhidou D2S et Volkswagen e-Golf devant les deux équipages italiens en Audi e-tron.

L’écosystème électrique en Grèce

Autant être direct : la voiture électrique n’existe quasiment pas en Grèce. D’un marché automobile porteur en 2000 avec un record de 290.222 voitures neuves vendues en un an, tout s’est effondré au plus fort de la crise nationale en 2012 avec seulement 58.479 immatriculations. Problème, c’est à ce moment-là que la plupart des autres pays ont commencé à travailler sur la mise en place d’un réseau – au sens large – permettant à la voiture électrique de prendre un premier envol.

Petit marché du sud de l’Europe, la Grèce n’est pas non plus un objectif pour les constructeurs. La plupart ne sont représentés que par des importateurs qui travaillent d’abord leur rentabilité plutôt que d’avoir une expérience globale de marque.

En termes de volumes, Toyota est en tête du marché grec (10,5 %), devant FIAT (9,2 %), Nissan (8,4 %), Peugeot (8,2 %) et Opel (7,2 %). Quelques centaines de BMW i3 REx ont été vendues dans le pays.

Lors de notre parcours de près de 300 kilomètres dans Athènes et sa région, aucun logo représentant une borne de charge ne s’est montré. Un maigre réseau est pourtant présent dans la capitale, mais il est inexistant en dehors de cette région qui est composée de la moitié de la population du pays.

Pire, si l’écologie pouvait être un élément important pour lancer le déploiement des véhicules électriques, les Grecs ne veulent pas en entendre parler… Parfaitement équipé en termes de vent et de soleil, le pays n’exploite quasiment pas ses énergies renouvelables. C’est une centrale à charbon située au nord qui fournit la majorité de l’électricité locale. Et ce n’est pas près de changer. Une vidéo montrant un vautour heurté par une pale d’éolienne est devenue virale, lançant des associations à l’assaut des quelques parcs déjà installés.

Selon les responsables locaux, il est inutile de croire que la situation pourrait évoluer à court ou moyen terme. Le pays ne se remet pas de la crise et le gouvernement ne mettra pas la voiture électrique dans ses priorités… Sauf si l’idée vient de l’extérieur. La Grèce (et son gouvernement) est très influencée par les politiques menées en Allemagne et en Italie. Si l’un de ces deux pays, notamment l’Allemagne, entame un processus collaboratif pour promouvoir la voiture électrique, la politique de la Grèce pourrait évoluer. Mieux encore, pour que la Grèce progresse, il faudrait une loi européenne imposant le déploiement de bornes, voire des aides à l’achat de voitures neuves. Pour les amoureux de la voiture électrique en Grèce, le salut ne pourra venir que de l’extérieur !