Complexe il y a quelques années, la traversée de l’Europe en voiture électrique est désormais envisageable. S’il existe encore de fortes disparités entre les pays du pourtour méditerranéen et ceux du nord, les bornes de recharge rapides se répandent à un rythme effréné. Automobile-Propre fait le point sur les principaux réseaux de recharge en service sur le Vieux-continent.

Les réseaux paneuropéens

Les superchargeurs Tesla

Certains réseaux de recharge peuvent être utilisés dans plusieurs pays d’Europe avec le même moyen de paiement ou d’identification. Le plus célèbre et le plus étendu est le réseau de Superchargeurs déployé par Tesla. De Fuengirola au sud de l’Espagne à Sorkjosen à l’extrême nord de la Norvège, il propose plus de 400 stations, chacune équipée de plusieurs bornes. Ce réseau n’est cependant accessible qu’aux propriétaires de véhicules Tesla, automatiquement reconnus lors du branchement de la prise.

S’ils ne bénéficient pas de la recharge gratuite, les utilisateurs sont facturés via la carte bancaire renseignée sur leur compte client Tesla. Les tarifs diffèrent selon le pays. En France au 1er septembre 2019 elle coûte 0,24 € par kWh mais peut s’envoler en cas d’utilisation « injustifiée ». Des frais qui s’ajoutent lorsqu’un véhicule reste branché plus de 5 minutes au terme d’une charge complète et si la station est occupée à plus de 50%.

Le superchargeurs offrent la possibilité de charger à une puissance maximale de 150 kW DC, qui doit être portée à 250 kW DC d’ici la fin 2019. Le réseau est fréquemment mis à jour par Tesla et présente un niveau de fiabilité très élevé. Il doit également poursuivre son extension pour atteindre l’objectif de couvrir « 100% de l’Europe […], de l’Irlande à Kiev, de la Norvège à la Turquie » annoncé par Elon Musk. Si son ouverture aux véhicules électriques non-Tesla a plusieurs fois été évoquée, elle n’est aujourd’hui pas envisagée. Il est d’ailleurs probable que les superchargeurs restent à jamais réservés aux modèles Tesla au vu de l’investissement colossal réalisé par la marque et de l’avantage fourni à ses clients.

Les bornes Lidl

Aussi surprenant que cela puisse paraître, les superchargeurs Tesla sont talonnés par les bornes installées par Lidl. En effet, le géant européen de la grande-distribution compte actuellement 402 stations de recharge déployées sur les parkings de ses supermarchés. Si la majorité des bornes se situe en France, en Allemagne aux Pays-Bas et au Bénélux, il est possible d’en trouver dans de nombreux pays : de Telde aux Canaries jusqu’à Kuopio au centre de la Finlande.

L’accès au réseau est gratuit et ne nécessite aucune identification. Il suffit de brancher son véhicule et de suivre les indications sur la borne pour lancer la charge. Différents modèles sont utilisés et délivrent une puissance de 7 et 22 kW AC ou 50 kW DC via les connecteurs T2, Combo CCS et Chademo, selon les magasins. Attention toutefois, la disponibilité des bornes est très aléatoire. Lidl n’est pas un gestionnaire de réseau de recharge et n’assure donc pas toujours un niveau élevé de maintenance. Il arrive que les sites de recharge soient hors-service ou simplement bloqués par des véhicules thermiques illégalement stationnés.

Très discret sur sa politique de déploiement, Lidl a un temps évoqué l’installation de 900 bornes d’ici 2021 en France. La marque compte 8000 magasins en Europe dont 1500 en France. Il y a donc un fort potentiel de développement d’un grand nombre de sites de recharge à travers le Vieux-continent.

Le réseau Ionity

Déjà fort de 173 stations de recharge, le réseau Ionity connaît une progression explosive. Les nouvelles installations fleurissent au pas de course depuis 2017, soutenues par le financement de ses propriétaires : les géants automobiles que sont les groupes Volkswagen, BMW, Ford et Daimler. C’est actuellement le seul réseau paneuropéen à proposer une recharge allant jusqu’à 350 kW DC. Une puissance qu’aucun véhicule ne peut cependant exploiter, en attendant la sortie de la Porsche Taycan.

Il est accessible à tous les utilisateurs de véhicules électriques équipés d’un connecteur Combo CCS et sur certaines rares stations, d’un connecteur Chademo. Le lancement et la facturation de la recharge s’effectuent via une carte d’opérateur de mobilité ou directement sur le site de Ionity. Gratuite au lancement du réseau, elle coûte aujourd’hui 8 euros auxquels il faut ajouter la commission de l’opérateur de mobilité le cas échéant. Un tarif très avantageux puisqu’il s’agit d’un forfait fixe, quelle que soit la quantité d’énergie débitée ou la durée de la recharge. Avec l’augmentation de la fréquentation, il est très probable que le prix évolue dans les années à venir.

Ionity prévoit de mettre en service un total de 400 stations en Europe d’ici 2021, dont 80 en France. La société semble cependant privilégier les pays du nord (France, Allemagne, Bénélux, Pays-Bas, Suisse et états Baltes). L’Italie et l’Espagne sont actuellement très peu équipés et comptent seulement 5 stations. Des disparités également constatées au Royaume-Uni et en Irlande (4 stations chacun), mais qui pourraient disparaître à long terme avec l’avènement de la voiture électrique.

Crédit photo : Tank & Rast

Le réseau Allego

Concentré aux Pays-Bas et ses pays frontaliers, le réseau Allego gère un nombre colossal de bornes : plus de 4000 au 1er septembre 2019. L’opérateur racheté par le fonds d’investissement français Meridiam ambitionne de s’étendre à travers l’Europe via le projet Mega-e. 322 bornes de recharge ultra-rapides 350 kW DC doivent prochainement être installées en France, Belgique, Danemark, Estonie, Finlande, Allemagne, Lettonie, Lituanie, Luxembourg, Suède, Pologne, au Royaume-Uni et logiquement aux Pays-Bas. Le premier site a été mis en service en juillet 2018. Il propose une recharge via les connecteurs Combo CCS, Chademo et T2, payables via un badge d’opérateur de mobilité ou une application mobile.

En attendant le déploiement complet des bornes Mega-e, Allego propose de très nombreuses stations capables de charger à différentes puissances de 11 kW AC à 50 kW DC, essentiellement implantées aux Pays-Bas et au Bénélux. La recharge est facturée entre 0,325 et 0,793 € le kWh en fonction de la puissance et de l’opérateur de mobilité utilisé. Un tarif particulièrement élevé justifié notamment par les coûts importants de maintenance de ce réseau tentaculaire.

Le réseau Fastned

Lancé aux Pays-Bas, où se trouve l’immense majorité de ses 112 bornes, le réseau de recharge ultra-rapide Fastned a des ambitions européennes. Il compte quelques stations en Allemagne et au Royaume-Uni et semble vouloir s’étendre à d’autres pays comme la France. Tous les utilisateurs de voitures électriques peuvent y accéder en utilisant un badge d’opérateur de mobilité ou une application mobile. La recharge est facturée 0,35 ou 0,59 € le kWh selon le mode utilisé et la formule souscrite.

Les bornes sont compatibles avec les connecteurs Combo CCS, Chademo et T2 et délivrent une puissance de 43 kW AC à 350 kW DC. Elles ont la particularité d’être souvent abritées sous une marquise jaune équipée d’une toiture photovoltaïque.

Les bornes des concessions automobiles

Les constructeurs proposant des véhicules électriques à leur catalogue équipent souvent leurs concessions de bornes de recharge. Leur accessibilité est parfois très limitée tout comme leur fiabilité et les puissances disponibles sont très hétérogènes. En pionnier de l’électrique, Nissan possède un réseau fourni avec plus de 400 sites de charge répartis un peu partout en Europe, du sud de l’Espagne au nord de la Finlande.

Ces bornes sont situées chez des concessionnaires mais également sur des parkings de supermarchés et certaines aires d’autoroute. Certaines sont libres d’accès, d’autres réservées aux clients Nissan ou à ceux équipés d’un badge spécifique. Leur utilisation est parfois conditionnée à discrétion du gestionnaire de la concession. Gratuite, la recharge s’effectue en 7 kW AC jusqu’à 50 kW DC et uniquement au standard T2 ou Chademo, ce dernier étant exclusivement utilisé par les véhicules électriques Nissan.

Grâce à sa Zoé commercialisée dans de très nombreux pays, Renault possède aussi un réseau de recharge conséquent en concessions. Plus de 700 sites de charge sont répertoriés en Europe, dont une grande partie en France. La recharge est gratuite mais conditionnée aux horaires d’ouverture des succursales et à la bonne volonté de leurs gérants. Elle s’effectue uniquement en courant alternatif (AC) jusqu’à une puissance de 22 kW.

Sur le même modèle, d’autres constructeurs comme BMW, Kia, Hyundai, Volkswagen, Mercedes, Audi ou encore Peugeot et Citroën ont installé des bornes de recharge sur leurs points de vente. Elles sont principalement utilisées pour recharger les véhicules qui y sont rattachés et souvent réservées aux clients. Il est parfois difficile de s’y recharger car leur emplacement, leur maintenance et le niveau de motivation de leur gestionnaire est très aléatoire.

Concession Renault de Saint Denis

Une borne de la concession Renault de Saint-Denis-de-La-Réunion.

Les réseaux de recharge rapide nationaux

Corri-Door

Plusieurs pays d’Europe possèdent leurs propres réseaux de recharge rapide. S’ils ne dépassent pas leurs frontières, ils restent un maillon important pour la recharge à l’échelle du continent. En France, le célèbre réseau Corri-Door géré par la filiale d’EDF Izivia compte 227 stations de recharge, presque exclusivement implantées sur les aires d’autoroute. Exploitant un matériel âgé à la maintenance compliquée, sa fiabilité est très critiquée. Son mode de facturation par tranche de 5 minutes indépendant de la puissance et de la quantité d’énergie délivrée fait également polémique.

Le réseau Corri-Door reste cependant incontournable lorsqu’on traverse l’hexagone via l’autoroute. Il propose jusqu’à 50 kW DC de puissance. Il est accessible à tous et le paiement s’effectue avec un badge d’opérateur de mobilité, par carte bancaire sur le site d’Izivia ou en achetant une carte en boutique de station-service. Il en coûte de 0,5 à 1 € les 5 minutes selon la formule souscrite via le badge Izivia et 0,26 € la minute + 1,5 € par recharge avec le Chargemap Pass, l’un des opérateurs de mobilité qui permet d’accéder au réseau.

Les pétroliers

Les distributeurs de gaz et de carburants sont généralement à la traîne en terme de déploiement de bornes de recharge. La croissance du nombre de véhicules électriques les incitent cependant à la transition. Total, BP, Shell, Avia, Repsol ou encore Enel ont équipé certaines de leurs stations-services de borne rapides. Elles communiquent toutes sur leur volonté de déployer plusieurs centaines à plusieurs milliers de sites de recharge mais les actes ont souvent du mal à suivre les annonces.

Sous une même enseigne, les types de bornes, puissances et modes de facturation peuvent varier fortement selon les stations et les pays. Il faut donc souvent se rendre sur place pour connaître toutes les modalités. Leur niveau de maintenance est également moyen et les pannes courantes.

Les commerces

Centres commerciaux, supermarchés isolés, petits commerces et hôtels ; de plus en plus d’établissements s’équipent de bornes de recharge pour verdir leur image et attirer de la clientèle. Les installations peuvent être le fruit de politique globales aidées ou non par des partenaires mais aussi d’initiatives privées. Souvent gratuit, leur accès est parfois activé par une carte qui peut être obtenue auprès du commerce. Certaines sont exclusivement réservées aux clients. Les bornes délivrent des puissances souvent situées entre 3 et 22 kW AC et plus rarement 50 kW DC principalement via un connecteur T2 (Chademo ou Combo pour le DC).  Tesla a notamment installé un réseau complémentaire à ses superchargeurs appelé “chargeurs à destination”. Généralement implantées dans des hôtels, golfs et restaurants haut-de-gamme, les bornes permettent de recharger même si l’on ne possède pas de véhicule Tesla.

Les collectivités

Dans de nombreux pays d’Europe, des organismes et collectivités locales ont déployé des bornes de recharge. De 7 kW AC à 150 kW DC, les sites proposent des puissances et types de connecteurs très variés. Les modes d’accès et de paiement rédigés dans la langue locale peuvent parfois être difficiles à déchiffrer, particulièrement pour un utilisateur étranger. Elles sont souvent accessibles avec le badge d’un opérateur de mobilité ou en paiement direct via un site internet.

Comment activer et payer ses recharges lors d’un trajet à travers l’Europe ?

Pour éviter de jongler entre les multiples cartes et sites internet à chaque recharge, le plus simple reste de se procurer un badge d’opérateur de mobilité. Certains permettent d’accéder à des réseaux situés partout en Europe comme le Chargemap Pass et le badge New Motion. La recharge est souvent plus chère de quelques centimes à quelques euros mais le service rendu est très pratique. Avec un seul et même badge, on peut ainsi accéder à des milliers de stations, connaître leur emplacement et caractéristiques et consulter les factures sur son compte client.

Quelques badges d’accès aux bornes de recharge.