En recul de plus de 20 points ces cinq dernières années, la part de marché des voitures particulières à moteur diesel repassera cette année sous la barre symbolique des 50% des immatriculations neuves. Loin de la révolution annoncée par les médias ces dernières semaines, ce recul historique des ventes de voitures particulières à moteur diesel est d’abord un juste retour des choses eu égard à la réalité des besoins des ménages et plus encore des usages automobiles un peu partout en France. Explications.

Un recul historique des ventes de voitures particulières diesel

de 73% de part de marché en 2012, la part des voitures particulières (VP) à moteur diesel a clôturé l’année 2016 à 52%[1].  C’est 5 points de moins qu’en 2015 alors que 2014 avait déjà enregistré un recul de près de 7 points des immatriculations de VP diesel neufs par rapport à 2013.

A ce rythme, les voitures particulières diesel devraient donc représenter moins de 1 immatriculation neuve sur 2 en 2017. Un juste retour des choses quand on regarde attentivement l’usage que les français font de leur voiture, qu’ils soient habitants des grandes villes ou non.

Précisons à ce stade que ce chiffre des ventes de VP neufs ne veut plus dire grand chose quand plus de 50% des ventes en question sont désormais le fait d’entreprises diverses et variées, y compris des sociétés de leasing, qui immatriculent des voitures neuves pour le compte de leurs clients, professionnels ou non. Or, s’agissant des clients professionnels, est-il besoin de rappeler ici le rôle déterminant que joue la fiscalité qui s’applique aux véhicules en question et au carburant qui va avec ?

[1] Le recul est plus marqué encore si l’on isole des ventes la part des VP neufs achetés par des entreprises qui, fiscalité oblige, continue à carburer très majoritairement au gazole.

A propos de l’usage…

Si la fiscalité carburant a une responsabilité majeure sur la composition actuelle du parc roulant et sur la répartition des ventes de voitures neuves, l’autre paramètre qui devrait, au moins en théorie, jouer un rôle tout aussi important au moment de l’achat d’un véhicule, c’est évidemment les besoins et les usages auxquels il est supposé répondre.

Même après l’affaire Volkswagen, n’ayons pas peur de dire que ce n’est pas seulement le moteur le problème mais bien l’usage que les automobilistes en font ainsi que l’origine du carburant qui l’alimente.

De ce point de vue, même un diesel – surtout Euro 6 – ne déroge pas à cette règle. En d’autre terme, si tous les monospaces, SUV et autres crossovers diesel à vocation familiale qui sillonnent les routes de France quotidiennement ne circulaient qu’avec au moins 3 personnes à bord sur route et autoroute en prenant soin d’éviter les trajets effectués seul au volant en milieu urbain dense, l’air des grandes villes françaises serait assurément de meilleur qualité que ce qu’il est aujourd’hui. Sauf qu’entre cet idéal et la réalité des pratiques, il y a un gouffre que plus personne aujourd’hui ne peut nier, pas même les professionnels du marketing pourtant si habiles lorsqu’il s’agit de mettre en scène le dernier crossover à la mode du moment au milieu de paysages tous plus extraordinaires les uns que les autres…

Même constat s’agissant de la fiabilité : si l’automobiliste français était un peu moins dépendant de sa voiture, y compris pour parcourir quelques kilomètres seulement moteur froid, les véhicules à moteur diesel n’auraient certainement pas connu la hausse spectaculaire de dysfonctionnements en tout genre constatés ces quinze dernières années !

Ces deux seuls exemples montrent que les constructeurs seuls ne peuvent être tenus responsables des nombreuses pollutions dont l’automobile est aujourd’hui à l’origine même s’il faut bien avouer que tous ou presque font semblant d’ignorer depuis des années le décalage criant entre les produits qu’ils conçoivent et l’usage qu’en font les automobilistes.

La problématique fiscale

C’est une problématique bien connue des lecteurs d’ Automobile Propre et des chefs d’entreprises mais qui en revanche reste très mal connue par ailleurs : la fiscalité applicable au carburant utilisé par les véhicules des entreprises, que ce soit les véhicules de tourisme des sociétés (VTS) ou les véhicules utilitaires (VU). Or, on a déjà eu l’occasion de l’expliquer à de multiples reprises, cette fiscalité a joué un rôle absolument central dans la surdieselisation du parc automobile français ces 20 dernières années. Pour mémoire, jusqu’en 2016, seuls les véhicules carburant au gazole (ou à l’E85…) permettaient de récupérer tout ou partie de la TVA des dépenses annuelles en carburant, à hauteur de 80% pour les véhicules de tourisme des sociétés et 100% pour les véhicules utilitaires.

C’est toujours par le biais de cette mesure fiscale d’un autre âge que les entreprises françaises continuent d’immatriculer tous les ans des centaines de milliers de voitures particulières neuves alimentées au gazole (certaines étant parfois transformées en VU pour pouvoir récupérer l’intégralité de la TVA carburant durant toute la durée de leur vie « utilitaire ») mais aussi des véhicules utilitaires.

Depuis le 1er janvier 2017, la récupération partielle de TVA sur les véhicules de tourisme des sociétés alimentés au sans plomb est enfin récupérable mais à hauteur de 10% seulement contre 80% pour le gazole, ce qui ne devrait pas changer grand chose dans l’immédiat hélas. Comme l’indique le tableau ci-dessous, ce n’est véritablement qu’à partir de 2019 que cela devrait commencer à influencer le choix des entreprises. Ce qui comme par hasard coïncide avec la date à laquelle nos champions nationaux commenceront à proposer des modèles hybride-essence (rechargeable) dans leur gamme. De là à dire qu’en France, les lois sont d’abord faites par les lobbys plutôt que par des politiciens compétents et visionnaires…

Le problème de l’offre

Conséquence directe de cette politique fiscale archaïque menée depuis des années : du coté des constructeurs, les alternatives au diesel ont été progressivement réduites voire totalement supprimées sur certaines gammes de véhicule. C’est notamment le cas de nombreux véhicules utilitaires mais aussi celui de certains ludospaces ou grands monospaces sur lesquels l’offre alternative au diesel se limite bien souvent à une ou deux motorisations à essence intrinsèquement moins bien adaptées à ce genre de véhicules dès qu’il s’agit de prendre la route en famille, chargé, qui plus est sur des parcours exigeants (montagne, autoroute, etc…).

Quant aux alternatives GNV, hybride ou électrique (avec ou sans prolongateur d’autonomie) les doigts d’une main suffisent à les comptabiliser. Saluons néanmoins nue nouvelle fois, l’arrivée très attendue du nouveau Kangoo ZE qui, au moins sur le papier, offrira enfin une réelle alternative au diesel pour un grand nombre de professionnels, qu’ils soient commerçants, artisans, entrepreneurs, professionnels du tourisme, etc… (parmi les clients potentiels, certains auraient certainement apprécié de pouvoir choisir en option un chargeur intégré 22 kW voire un prolongateur d’autonomie…)

Alimenter le marché de l’occasion avec plus d’hybride et plus d’électrique

Rappelant au passage que le marché du neuf reste le seul et unique moyen d’alimenter le marché de l’occasion avec des véhicules plus propres que ce qui le compose encore majoritairement aujourd’hui, on en vient alors à se poser la question suivante : faut-il encore acheter un diesel neuf en 2017 ?

A la lecture des éléments ci-dessus, on comprend bien que la réponse à cette question est malheureusement loin d’être simple. Car au delà de la problématique fiscale qui continue à encourager outrageusement les entreprises à rouler au gazole, il reste un problème de taille du coté de l’offre constructeur. C’est particulièrement vrai sur des véhicules au gabarit imposant et/ou à vocation familiale, pour lesquels le choix d’un moteur diesel demeure pertinent, surtout pour des usages majoritairement extra-urbains et/ou longs. Dans ce cas de figure, on préférera alors l’acquisition d’un modèle d’occasion récent plutôt qu’un modèle neuf, ne serait-ce que pour cesser d’alimenter le marché futur du véhicule d’occasion avec un type de motorisation qui manque finalement de polyvalence eu égard à l’usage réel qu’en font la majorité des automobilistes. En gardant précieusement les économies réalisées par rapport à un achat neuf pour l’acquisition d’un futur modèle hybride ou électrique…

Une autre solution consiste à restreindre volontairement son choix en direction des rares modèles disponibles en version hybride ou électrique, quitte à devoir faire quelques compromis sur l’autonomie, le volume de chargement disponible et/ou les équipements disponibles.

Vivre au futur plutôt qu’au passé

Considérant que moins de 15% des véhicules neufs vendus se justifient encore en version diesel au regard des usages réels auxquels ils auront à répondre tout au long de leur vie, on mesure le formidable potentiel que constitue les technologies hybride et l’électrique pour répondre plus efficacement aux besoins des automobilistes français.

Malgré une offre qui reste bien plus limitée que l’offre thermique classique, on ne saurait que trop conseiller à tous les automobilistes qui circulent très régulièrement en ville d’opter sans attendre pour l’hybride ou l’électrique plutôt que le diesel. Quant aux professionnels, malgré une fiscalité qui reste favorable au gazole, il est évident que les taxis, les VTC et autres professionnels circulant quotidiennement à l’intérieur des grandes villes ont tout à gagner à anticiper dès à présent les obligations réglementaires auxquelles ils auront à répondre à partir de 2020 pour rouler plus propre…

Vive le futur !