Pompe Diesel

Depuis bientôt deux semaines, l’affaire Volkswagen inonde les réseaux sociaux. Difficile de dire quelles seront les conséquences à long terme de cette tricherie organisée largement relayée par les médias de tous bords, à travers le monde entier.

Du coté des décideurs politiques et de plusieurs autres responsables indirectement impliqués dans cette affaire, une chose est sûre, l’hypocrisie bat son plein…

I. Mise au point

Sans sous-estimer l’ampleur de la supercherie, il convient avant toute chose de relativiser l’ampleur du préjudice environnemental : oui les 11 millions de moteurs incriminés rejettent potentiellement des quantités de NOx très supérieures à la limite autorisée. Mais pas toujours dans les proportions indiquées par les médias qui se sont emparés du sujet sans forcément bien le maitriser (sur des sujets très techniques, c’est assez courant me direz-vous).

En usage autoroutier ou lorsque le véhicule en question est éco-conduit, les véhicules visés par l’enquête rejettent des quantités de NOx tout à fait comparables avec ce qui sort des pots d’échappement de la concurrence. Sur ce terrain, il n’y a guère que Mazda qui, grâce à une technologie exclusive arrive à réduire à la source les émissions de NOx et de particules fines de son gros 2,2L diesel sans pour autant les faire totalement disparaitre.

Dans les faits, c’est surtout pour les usages théoriquement très éloignés de ceux pour lesquels un moteur TDI est destiné que les émissions peuvent potentiellement crever les plafonds : la conduite sportive et/ou agressive, les trajets effectués en ville pour lesquels ce type de motorisations est intrinsèquement mal adapté.

Or, pour tous ces usages très éloignés du champ théorique d’un moteur diesel, ça fait bien longtemps qu’on sait qu’il n’y a pas que les moteurs TDI Volkswagen qui explosent les chiffres ! Les émissions de NOx étant fortement corrélées à la pression et à la température de combustion du mélange air-gazole, à pleine charge, les moteurs turbo-diesel haute pression sont de redoutables usines à NOx depuis plusieurs d’années déjà…

II. Occasion manquée

Si l’affaire Volkswagen a le mérite d’avoir fait éclater au grand jour un scandale bien connu par nombre de motoristes à travers le monde, jusqu’ici, elle a largement épargné les vrais pollueurs et fait semblant d’ignorer les vrais coupables à l’origine de ce fiasco.

Commençons par les vrais pollueurs. Entre 1999 et 2008, le groupe VAG a vendu plusieurs millions de moteurs TDI équipés des fameux injecteurs pompes, une technologie propre à VAG qui en l’échange d’un rendement moteur record, continue encore aujourd’hui de relarguer de grandes quantités de NOx et de particules fines dans l’air de nos villes. Ces moteurs, supposés répondre à la norme Euro4, ont été la cible privilégiée des amateurs de « chiptuning » et autres médiocrités du genre. Le fameux bloc 1.9 TDI, connu à l’époque pour sa fougue comparé aux très modestes HDI et autres dCi a équipé des millions de véhicules du groupe.

Dans ses déclinaisons les plus puissantes (TDI 130/150/160), ce moteur a fait l’objet d’innombrables reprogrammations pour offrir à ses propriétaires toujours plus de puissance… et toujours plus d’émissions de NOx ! Dépourvue de FAP, cette génération de moteur est indiscutablement celle qui mériterait d’être mis au banc des accusés avant toutes les autres. Il suffit d’aller se promener sur les forums de golfistes et autres sites de fanatiques de vroum vroum pour s’en convaincre.

Quant aux vrais coupables, outre les adeptes de la reprogrammation moteur et/ou du défapage, est-il besoin de rappeler la responsabilité de ceux qui font les lois et qui sont censés les faire respecter en s’en donnant les moyens? S’agissant de la France, est-il besoin de rappeler les conséquences désastreuses de 30 ans de subvention déguisée à la faveur des moteurs diesel ? Une hérésie qui encore aujourd’hui permet au gazole de s’afficher 20 c€ moins cher par litre vendu que le SP95 malgré un pouvoir énergétique supérieur. Et comme si cela ne suffisait pas, le gazole permet en plus aux entreprises de récupérer partiellement la TVA sur leur dépense annuelle en carburant ! Une fois n’est pas coutume, au royaume des aveugles, les borgnes sont rois…

III. Que l’Etat commence à balayer devant sa porte

Plutôt que d’alimenter la surenchère face à la pollution générée par les motorisations TDI « truquées », nombreux sont ceux qui feraient mieux de balayer devant leur porte avant de s’en prendre en bloc aux méchants industriels qui trichent.

Si nombre de clients VAG ont été lamentablement trompés, tous ne s’en offusquent pas autant qu’on veut nous le faire croire ! Car entre une voiture propre et un TDI qui répond du tac au tac aux sollicitations du pied droit, malheureusement, il y a encore en 2015 un grand nombre d’automobilistes qui préfèrent la 2ème option à la 1ère !

Même constat du coté des représentants de l’Etat : que les services centraux commencent déjà par sanctionner toutes les pratiques illégales en matière de reprogrammation moteur, de défapage et autre médiocrité du genre avant de s’indigner des émissions de NOx dues aux moteurs diesel récents.

Autre point sur lequel il y aurait potentiellement beaucoup à dire : les contrôles anti-pollution totalement fantaisistes auxquels les voitures à pétrole sont aujourd’hui soumises lors du contrôle technique. Là encore, l’Etat ferait bien de s’inquiéter de savoir comment durcir les régles en vigueur plutôt que de continuer à fermer les yeux sur toute cette mascarade et les effets sanitaires désastreux qu’elle induit…

IV. l’hybride et l’électrique sur le devant de la scène

On a déjà eu l’occasion de le dire à de très nombreuses reprises sur ce blog, en milieu urbain, l’avenir passe inévitablement par l’hybride et l’électrique. Parce qu’en matière de propulsion automobile, seules l’hybride et l’électrique ont réussi à apporter la preuve qu’elles étaient synonymes de réduction significative des émissions de polluants dans la durée. Compte tenu du rythme d’adoption de ces deux technologies, le seul moyen réaliste d’enrayer drastiquement la pollution de l’air du au trafic routier dans les grandes villes françaises passe inévitablement par la restriction d’accès au centre-ville des voitures 100 % pétrole. Paris a commencé à ouvrir timidement la voie dans ce sens. Espérons que d’autres grandes villes françaises lui emboiteront le pas sans tarder.

D’ici là, sans rien faire, Toyota et les constructeurs de VE devraient en toute logique ressortir comme les grands bénéficiaires de cette affaire Volkswagen. Surtout que la liste des constructeurs de véhicule diesel loin de respecter les normes en vigueur devrait rapidement s’allonger au fur et à mesure des investigations à venir…